Le contrôle d'identité est la première forme d'atteinte à la liberté individuelle, toutefois, si ce contrôle se révèle infructueux, il peut déboucher sur vérification d'identité, qui est une mesure plus attentatoire aux libertés publiques.
Les contrôles d'identité : Articles 78-1 et 78-2 du CPP
Définition : Le contrôle d'identité est une opération qui consiste à inviter une personne à justifier, sur-le-champ, de son identité soit en présentant un document officiel revêtu de sa photographie ou toute autre pièce probante, soit en faisant appel au témoignage d'un tiers digne de foi.
Ces contrôles peuvent être effectués uniquement :
– par des agents habilités ;
– dans les cas limitativement déterminés par la loi.
Lorsque ces deux conditions sont réunies, toute personne se trouvant sur le territoire national doit accepter de se prêter au contrôle d'identité.
Ainsi, l'article 78-1 du CPP stipule que l'identité de toute personne se trouvant sur le territoire Français doit être en mesure de pouvoir justifier de son identité lors d'un contrôle légalement effectué.
En outre le terme « légal » signifie prévu par la loi.
Le contrôle d'identité peut être préventif : Contrôle de police administrative (a)
Le contrôle d'identité peut être répressif : Contrôle de police judiciaire (b)
Le contrôle d'identité sur les lieux de travail (c)
a) Le contrôle d'identité de police administrative
Les contrôles d'identité préventifs, effectués en dehors de toute enquête en cours, pose le problème aigu de concilier le maintien de l'ordre et les respect de libertés individuelles.
La recherche difficile d'un équilibre a toujours suscité un problème au grès des alternances politiques qui entraîna et entraînera encore de nombreuses réformes législatives :
La loi des sécurités et des libertés du 2 février 1981.
Cette réforme interdira les contrôles d'identité préventifs. La liberté d'aller et venir l' emportera sur les nécessité de sécurité publique. La jurisprudence les toléra lorsque des circonstances particulières l'exigeaient.
La loi promulguée sur la liberté et la sécurité légalisa cette pratique afin de prévenir une atteinte à la sécurité des biens et des personnes. Ainsi, pour prévenir un risque, toute personne pouvait être invité à justifier de son identité. Si elle refusait de justifier de son identité, elle pouvait être emmené au commissariat ou à la brigade de gendarmerie pour une vérification d'identité pendant une durée de 6 heures maximale.
Le 10 mai 1981, date de l'élection de François Mittérand.
Le contrôle préventif fut remis en cause, malgré l'insistance de Robert BADINTER, alors ministre de la justice pour conserver ces contrôles.
Circulaire du 13 septembre 1986 du ministre de l'intérieure Charles PASQUA.
Après cette circulaire, il était possible d'opérer des contrôles d'identité préventifs partout où il existait un risque potentiel. Cependant, le garde des sceaux exigea que ces contrôles soient motivés.
Loi du 10 août 1993.
Cette loi consacre le fait que « l'identité de toute personne, quel que soit son comportement, peut être contrôlée pour prévenir une atteinte à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes et des biens.
L'exigence d'un comportement supposé délictuel, pour procéder à ce contrôle a disparu. Toutefois les contrôles d'identité préventifs ne doivent pas être pour autant discrétionnaires et les différents cas sont énumérés par le CPP.
Cette loi consacre également les opérations dites « coups de poing » en intégrant l'article 78-2 alinéa 2 du C.P.P. Afin de lutter contre des catégories d'infractions précisées sur la réquisition. Ainsi, le Procureur de la République peut, sur réquisition, autoriser les OPJ, APJ, et APJA contrôler l'identité de toute personne dans un lieu et un temps déterminé. Il est alors nullement besoin de justifier de ce contrôle qui ordonné par l'autorité judiciaire.
Ce dispositif sera complété par la loi du 18 mars 2003 avec l'article 78-2-2 du CPP prescrivant la possibilité de contrôler l'identité de toute personne et la possibilité de visiter les véhicules pour un temps et un lieu déterminé sur la réquisition afin de rechercher et de poursuivre des actes de terrorisme.
Loi du 18 mars 2003, dite loi Sarkozy
– Article 78-2-3 du CPP
Conformément à cet article, les OPJ, APJ et APJA peuvent procéder à la visite des véhicules circulant ou arrêté sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public lorsqu'il existe à l'égard du conducteur une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis ou tenté de commettre comme auteur ou complice un crime ou un délit flagrant.
– Article 78-2-4 du CPP
Cet article prévoit que la police judiciaire a la possibilité de procéder à la visite d'un véhicule avec l'accord et la présence de son propriétaire afin de prévenir une atteinte à la sécurité des personnes et des biens.
Si ce dernier refuse, il est nécessaire de contacter immédiatement le Procureur de la République. En attendant ces instructions, le véhicule peut être immobilisé pour une durée ne dépassant pas 30 minutes.
Conformément à l'article 78-2 alinéa 3 du CPP, les contrôles de police administrative sont prescrits afin de prévenir une atteinte à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes et des biens. Ainsi, l'identité de toute personne, quel que soit sont comportement peut être contrôlée.
Exception : Convention de Schengen.
L'article 78-2 alinéa 4 du CPP prévoit que l'identité de toute personne peut être contrôlé dans une zone comprise entre la frontière terrestre de la France et les autres États membres de la convention Schengen et une ligne tracée à 20 km en deçà de celle ci. Cette convention de Schengen prévoit que l'identité de toute personne peut également être contrôlée dans une zone accessible au public dans les ports, aéroports, gares ferroviaires et routières.
b) Le contrôle d'identité de police judiciaire
On dit de ce contrôle qu'il est à vocation judiciaire, car il est accompli sur la base du soupçon que l'individu a commis ou tenté de commettre une infraction.
L'article 78-2 alinéa 1 du CPP précise que les OPJ, APJ et APJA peuvent inviter à justifier par tout moyen l'identité de toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs rasons plausibles de soupçonner (loi du 18 mars 2003) :
– Qu'elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit.
– Qu'elle se prépare à commettre un crime ou un délit
– Qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou de délit.
– Qu'elle fait l'objet de recherches ordonnées par l'autorité judiciaire.
Le contrôle sera légale que s'il répond à une de ces 4 situations.
Il appartient donc à l'enquêteur de justifier de ce soupçon pour lequel l'individu à du se prêter au contrôle d'identité.
Exemples : Dissimuler un objet à la vue des enquêteurs, tituber sur la voie publique peut laisser présumer la consommation de produits stupéfiants, fuir à la vue des gendarmes ou policiers peut être un indice laissant présumer que la personne se soustrait afin de cacher la commission d'une crime ou d'un délit.
c) Les contrôles d'identité sur les lieux de travail (Article 78-2-1 du CPP)
Le procureur de la République peut requérir les OPJ et sur l'ordre ou la responsabilité de ceux-ci, les APJ et les APJ-A pour entrer dans les lieux à usage professionnel ainsi que dans leurs annexes et dépendances, sauf s'ils constituent un domicile, où sont en cours des activités de construction, de production, de transformation, de réparation, de prestation de services ou de commercialisation afin de :
– S'assurer que ces activités ont donné lieu à l'immatriculation au répertoire des métiers, ou au registre du commerce et des sociétés lorsqu'elle est obligatoire, ainsi qu'aux déclarations exigées par les organismes de protection sociale et l'administration fiscale.
– Se faire présenter le registre unique du personnel et les documents attestant que les déclarations préalables à l'embauche ont été effectuées.
– Contrôler l'identité des personnes occupées, dans le seul but de vérifier qu'elles figurent sur le registre ou qu'elles ont fait l'objet des déclarations mentionnées à l'alinéa précédent.
La personne invitée à justifier de son identité lors d'un contrôle légalement effectué peut présenter toute pièces officielle revêtu de sa photographie, tel que permis de conduire, carte d'identité, passeport.
Toute personne qui refuse ou qui n'est pas en mesure de décliner son identité peut être soumise à la procédure dite de vérification d'identité et ce, quelque soit la nature du contrôle.. (article 78-3 du CPP)
Les vérifications d'identité : Article 78-3 du CPP
Définition : La vérification d'identité est une opération tendant à établir ou à vérifier COERCITIVEMENT, sur place ou dans un local de police, l'identité d'une personne qui refuse ou qui se trouve dans l'impossibilité de justifier de son identité, lors d'un contrôle légalement effectué.
Seuls les OPJ sont habilités à procéder à des vérifications d'identité.
Lorsque la personne a été interpellée par un APJ ou un APJ-A mentionné à l'article 21-1°, il doit la présenter immédiatement à un officier de police judiciaire, qui la met en mesure de fournir par tout moyen les éléments permettant d'établir son identité et qui procède, s'il y a lieu, aux opérations de vérification nécessaires.
La personne qui fait l'objet d'une vérification peut être retenue dans un local de police pour une durée qui ne saurait excéder le temps strictement nécessaire à l'établissement de l'identité de la personne retenue. Cette durée ne peut en aucun cas dépasser 4 heures à compter du contrôle d'identité.
Le procureur de la République peut mettre fin à cette rétention, à tout moment.
a) Opérations tendant à établir l'identité
La première opération consiste à procéder à toute investigation tendant à confirmer ou à établir l'identité de la personne retenue : audition de tiers, prise de contact avec la brigade ou le commissariat de police du domicile, avec une autre brigade, avec la mairie, interrogation des fichiers ...
L'OPJ peut procéder à la prise d'empreintes digitales ou de photographies, mais uniquement lorsque les conditions suivantes sont réunies :
– La personne interpellée maintient son refus de justifier de son identité ou fournit des éléments d'identité manifestement inexacts
– L'opération constitue l'unique moyen d'établir l'identité de l'intéressé
– Le procureur de la République ou le juge d'instruction, selon le cas, l'autorise, verbalement ou par écrit.
b) Obligations de l'OPJ
La première obligation de l'OPJ est que la personne retenue puisse bénéficier de ses droits.
Dès le début de la rétention, l'O.P.J. doit informer la personne retenue de son droit :
– De faire aviser le procureur de la République de la vérification dont elle fait l'objet
– De prévenir à tout moment sa famille ou toute personne de son choix.
Si des circonstances particulières l'exigent, l'O.P.J. prévient lui-même la famille ou la personne choisie.
Attention : Lorsqu'il s'agit d'un mineur, le procureur de la République sera informé de cette mesure dés le début de la rétention.
Sauf impossibilité, le mineur doit être assisté de son représentant légal.
c) Rédaction du Procès verbal
Toute opération de vérification d'identité doit donner lieu à l'établissement d'un procès-verbal de vérification d'identité. Ce dernier doit impérativement comporter les mentions suivantes :
– Les motifs circonstanciés qui justifient le contrôle et la vérification d'identité
– Les conditions dans lesquelles la personne a été présentée devant l'O.P.J.
– Les conditions dans lesquelles la personne a été informée de ses droits et mise en mesure de les exercer
– Le jour et l'heure de contrôle et de la fin de la rétention
– La vérification d'identité s'est elle transformée en mesure de garde à vue ?
– Indiquer si la vérification d'identité a donné lieu à une prise d'empreintes ou de photographies, cette opération doit être mentionnée et spécialement motivée dans ce procès-verbal.
– L'intéressé doit signer ce procès-verbal. S'il refuse, mention est faite du refus et de ses motifs.
d) Les destinataires du procès-verbal
Deux situations sont à différencier :
– La vérification d'identité n'est suivie d'aucune procédure d'enquête :
• Le P.-V. de vérification d'identité n'est pas enregistré,
• Une copie de la mesure est remise à l'intéressé,
• La procédure est transmise au procureur de la République,
• L'exemplaire "Archives" et toutes les pièces annexes établies à cette occasion doivent être détruits dans un délai de six mois(2), sous le contrôle du procureur de la République ;
– La vérification d'identité est suivie d'une procédure d'enquête :
• Le P.-V. d'identification d'identité est enregistré,
• La procédure est transmise au procureur de la République, ou au juge d'instruction, avec la procédure d'enquête
Toutes les prescriptions relatives aux garanties de la liberté individuelle et aux formalités de la vérification s'imposent à tous les enquêteurs sous peine de nullité.
e) Contrôle d'identité suivie d'une Garde à Vue.
Il peut arriver qu'au cours d'un contrôle d'identité l'enquêteur démasque une infraction entrainant la rédaction d'une procédure judiciaire.
Lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit puni d'une peine d'emprisonnement, la personne peut être placée en garde à vue.
La garde à vue débute alors à l'heure du contrôle d'identité conformément à l'article 78-3, al. 11 du CPP.
f) Mesure de vérification d'identité suivi d'une Garde à Vue
Lorsque la vérification d'identité est suivie d'une procédure judiciaire, il peut arriver que l'enquêteur place la personne interpellée en garde à vue.
Lorsqu'une mesure de garde à vue sera prise à l'encontre d'une personne retenue pour une vérification d'identité, les prescriptions relatives à la garde à vue et les droits de la personne gardée à vue s'appliquent et la durée de la rétention sera alors imputée sur celle de la garde à vue.