Pour comprendre la Garde à vue il ne faut pas se contenter de l’aborder comme une mesure de rétention proprement dite, mais il faut également l’étudier en amont afin de comprendre pourquoi cette mesure est si rigoureuse. Ensuite, et seulement ensuite, il sera possible d’étudier la garde à vue.
D’après S.GUINCHARD, l’Officier de Police Judiciaire est une véritable cheville ouvrière de la police judiciaire et a pour attribution d’accomplir certains actes d’enquêtes dites attentatoire aux libertés publiques, tel que la Garde à vue.
Il peut paraître étrange de découvrir que la GAV n’est pas strictement définie par le Code de Procédure Pénal. Cependant, le petit manuel de la garde à vue de Laurent Schwartz nous rappelle que seul un décret de 1903, revu en 1958 s’y intéresse et la défini en les termes suivants :
« Doit être considéré en état de garde à vue toute personne qui n’est pas laissé libre de se retirer, notamment à la fin de son audition. Il s’agit donc de retenir une personne et de la priver ainsi de sa liberté d’aller et venir pour les besoins d’une enquête. »
Cette mesure se présente donc comme une véritable atteinte aux libertés individuelles. Ainsi plusieurs textes supra national ou législatif défendent les intérêts du citoyen, quand d’autres régissent l’activité de la police judicaire notamment pour des mesures privatives de liberté. Cette ambiguïté montre à quel point il apparait difficile de trouver un équilibre entre les contraintes et la protection du citoyen. Ainsi la procédure pénale étant un perpétuel chantier ne cesse d’évoluer. Ceci principalement dans l’objectif de défendre au mieux les intérêts du citoyen et nous plonge ainsi dans une situation antagoniste à la philosophie du premier empire qui avait pour objectif principal, la défense de l’état.
Voici quelques exemples de textes protégeant le citoyen.
Article 7 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 aout 1789
Nul homme ne peut être accusé, arrêté, ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis, mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l’instant : Il se rend coupable de résistance.
Article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 aout 1789
Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêt er, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi.
Loi du 4 janvier 1993. Modifiée par la loi du 24/08/1993.
Cette loi accorde des garanties à la personne gardée à vue. Ces droits sont toujours en vigueur aujourd’hui. Désormais, celui-ci peut :
- Prévenir un membre de sa famille un personne avec qui elle vit habituellement ou son employeur par téléphone
- Etre examiné par un médecin désigné par un OPJ ou le PR
- S’entretenir avec un avocat de façon confidentiel durant 30 minutes maximum. A cette époque cette intervention ne pouvait avoir lieu qu’à partir de la 20ème heure, mais la loi GUIGOU, dites loi sur le renforcement de la présomption d’innocence autorise l’intervention de l’assistance dés le début de la mesure de garde à vue.
La loi du 15 juin 2000.
Elle réduit également les différences opposant l’enquête préliminaire et l’enquête de flagrance en faisant disparaître notamment la possibilité de mettre en garde à vue un témoin en enquête de flagrance.
Une des grandes mesures de cette loi était également d’informer le suspect placé en GAV, de son droit au silence. Cette dernière étant trop contraignante, la loi du 4 mars 2002 amendera celle-ci.
L’idéologie de la présomption d’innocence n’est pas nouvelle puisqu’on y trouve sa présence dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Cependant il aura fallu attendre 2 siècles pour que la loi introduise ce principe. Ainsi la loi du 15 juin 2000, dite loi sur le renforcement de la présomption d’innocence stipule que : « Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie. »
Ainsi ce principe remet en cause la charge de la preuve, qui désormais incombe au demandeur qui se nomme le sujet actif.
Qui peut être placé en GAV ?
La loi du 15 juin 2000, dite loi GUIGOU, sur le renforcement de la présomption d’innocence stipulait que pouvait être placé en GAV toute personne à l’encontre de laquelle il existe des indices faisant présumer qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Ce texte était difficilement applicable et apporter une contrainte dans l’exercice de la police judiciaire. Comment faire si seulement un indice existait à l’encontre d’une personne suspectée ? Quel sens peut on attribué au mot indice ?
La garde vue apporte beaucoup pour parvenir à la manifestation de la vérité et même si l’aveu n’est plus la reine des preuves, elle permet le recoupement avec les indices. De plus, elle offre un moment privilégié avec la personne soupçonnée démunie de liberté et de ses habitudes hors la présence d’un avocat.
La loi du 4 mars 2002, modifia ce texte en les termes suivants :
Ainsi l’article 63-00 du CPP stipule :
L'officier de police judiciaire peut, pour les nécessités de l'enquête, placer en garde à vue toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction.
Droits de la personne gardée à vue (Art 63-1 à 63-4 du CPP)
- Toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police
judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête,
- Toute personne placée en GAV est des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que des
dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l'article 63 du CPP.
Les droits de la personne placée en GAV doivent lui être notifié le plus rapidement possible et ce dans un délai de 3 heures maximum.
De nos jours, il est très fréquent que les enquêteurs disposent d’un document faisant état des droits de la personne placée en GAV. Ainsi, l’enquêteur informe la personne soupçonnée de ses droits et lui présente ce document pour paraphe. S’il refuse de signer, mention en sera faite. Ce document sera ensuite intégré dans la procédure.
- Les droits de la personne placée en GAV doivent être communiqués à la personne gardée à vue dans une langue qu'elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits. Si cette personne est atteinte de surdité et qu'elle ne sait ni lire ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec des sourds. Il peut également être recouru à tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité.
Les droits de la personne gardée à vue sont :
Aviser un membre de sa famille ou son employeur. (63-2 du CPP)
Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, faire prévenir dans le délai prévu au dernier alinéa de l’article 63-1, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l'un de ses parents en ligne directe, l'un de ses frères et sœurs ou son employeur de la mesure dont elle est l'objet. Si l'officier de police judiciaire estime, en raison des nécessités de l'enquête, ne pas devoir faire droit à cette demande, il en réfère sans délai au procureur de la République qui décide, s'il y a lieu, d'y faire droit.
Une visite médicale (63-3 du CPP)
Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois.
A tout moment, le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire peut d'office désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue.
En l'absence de demande de la personne gardée à vue, du procureur de la République ou de l'officier de police judiciaire, un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande ; le médecin est désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire.
Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue. Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l'aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier.
S’entretenir avec un avocat (63-4 du CPP)
Dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à s’entretenir avec un avocat. Si elle n'est pas en mesure d'en désigner un ou si l'avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu'il lui en soit commis un d'office par le bâtonnier. (voir liste des avocats de permanence)
Le bâtonnier est informé de cette demande par tous moyens et sans délai.
L'avocat désigné peut communiquer avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l'entretien. Il est informé par l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature et de la date présumée de l'infraction sur laquelle porte l'enquête.
A l'issue de l'entretien dont la durée ne peut excéder trente minutes, l'avocat présente, le cas échéant, des observations écrites qui sont jointes à la procédure.
L'avocat ne peut faire état de cet entretien auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue.
Lorsque la garde à vue fait l’objet d’une prolongation, la personne peut également demander à s’entretenir avec un avocat dès le début de la prolongation, dans les conditions et selon les modalités prévues aux alinéas précédents.
Si la personne est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 4°, 6°, 7°, 8° et 15° de l'article 706-73 du CPP, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de quarante-huit heures. Si elle est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 3° et 11° du même article, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de soixante douze heures. Le procureur de la République est avisé de la qualification des faits retenue parles enquêteurs dès qu'il est informé par ces derniers du placement en garde à vue.
Devoirs de l’OPJ
- L’OPJ doit informer le Procureur de la République dés la mesure de garde à Vue.
- L’OPJ doit informer le plus rapidement possible et ce, dans un délai de trois heures, la personne gardée à vue
des droits qu’elle bénéficie. (art 63-1 à 63-4 du CPP)
- Accorder des temps de repos à la personne gardée à vue. Minimum 2 par période de 24 heures.
- Attribuer des temps de repos au cours desquels la personne gardée à vue pourra s’alimenter. Si elle n’a pu emporter de repas, lui en faire chauffer un (repas destiné aux personnes placée en GAV. Il s’agit en quelque sorte de ration de combat)
- Procéder à deux auditions minimums par période de 24 heures.
Fouille
Toute personne placée en garde vue doit être soumis à une fouille. Dans ce cas présent, par fouille, il faut entendre une fouille à corps de sureté par palpation appelée également fouille sommaire par palpation de sécurité.
Le but de cette fouille est de découvrir la présence d’objets susceptibles de nuire ou de servir à la manifestation de la vérité.
Cette notion de fouille reste évasive, car le législateur n’a pas expressément prévu de régime applicable en la matière.
Cependant, en matière de fouille administrative, les gendarmes sont habilités à procéder à ce type d’inspection depuis plus d’un siècle. En effet, le décret organique du 20 mai 1903 stipule que tout militaire de la gendarmerie qui arrête l’auteur d’un crime ou de délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, doit le fouiller en vue d’assurer aussi bien sa sécurité, que celle du délinquant. Cette fouille aura pour objet de découvrir des objets utiles à la manifestation de a vérité, mais aussi la découverte d’objets pouvant constituer une infraction ou d’objets pouvant nuire.
Durée de la GAV
- Droit Commun (24heures 00 + 24 heures 00)
La personne gardée à vue ne peut être retenue plus de vingt-quatre heures. Toutefois, la garde à vue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite du procureur de la République. Ce magistrat peut subordonner cette autorisation à la présentation préalable de la personne gardée à vue.
- Cas particuliers (jusqu’à
Fin de la garde à Vue
Sur instructions du procureur de la République, les personnes à l'encontre desquelles les éléments recueillis sont de nature à motiver l'exercice de poursuites sont, à l'issue de la garde à vue, soit remises en liberté, soit déférées devant ce magistrat.
Si la personne placée en garde à vue est remise en liberté, elle doit être avisée des suites données à l’enquête et mention en est faite dans le procès verbal de Garde à vue. Elle est informée que suivant les instructions du procureur de la République, il est remis en liberté et qu’il a la possibilité d' interroger le Procureur de la République à l’expiration d’un délai de six mois à compter du jour où il est remis en liberté quant à la suite donnée ou susceptible d’être donnée à la procédure. Ceci, seulement, si l’infraction mis en exergue n’est pas un crime ou un délit commis en bande organisée.